Le diorama de Bry

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À Bry, tout en continuant à s’adonner à la peinture, Daguerre poursuivit ses travaux photographiques. Simple et modeste, l’artiste sut immédiatement se faire apprécier de la population. Il se lia d’amitié avec le maire de la commune, son voisin Armand Mentienne (le père de l’historien Adrien Mentienne), qui habitait alors l’hôtel de Malestroit. Il côtoya également la châtelaine de Bry, Geneviève de Rigny, dont il appréciait tout particulièrement la conversation. Encouragé par Mademoiselle de Rigny, Daguerre proposa en 1841 de décorer le chœur de la petite église de Bry par un tableau à effets dont il avait le secret. Le projet nécessitait d’aménager le chevet de l’église et de construire une petite extension où devait être installée la peinture. Geneviève de Rigny offrit de supporter tous les frais d’installation.

Une vaste cathédrale imaginaire

Daguerre peignit derrière l’autel un tableau de grande dimension (cinq mètres de largeur sur six mètres de hauteur) représentant la nef d’une cathédrale gothique, en donnant l’impression, par le jeu de différents effets, que la petite église de Bry se prolongeait en une vaste cathédrale imaginaire. Afin de donner cette illusion de profondeur, Daguerre joua sur la transparence de la toile, peinte sur les deux côtés, et sut exploiter avec habileté l’éclairage naturel de l’église qu’il avait amélioré en faisant installer une verrière zénithale au-dessus de la toile. Pour conduire le regard du spectateur vers le tableau et ainsi renforcer l’illusion, il traita également le chœur et la nef de l’église comme une avant-scène de théâtre et fit peindre et placer des éléments de décor dans le style de la toile.

L’artiste consacra six mois de travail assidu à la peinture de ce diorama qu’il réalisa entièrement sur place. L’œuvre fut inaugurée le 19 juin 1842, jour de la fête des saints patrons de l’église de Bry, Gervais et Protais. Le diorama attira immédiatement une foule de curieux qui se pressèrent à Bry pour admirer l’œuvre de Daguerre. S’il se trouva bien quelques personnes pour dénoncer « l’inconvenance » de ce spectacle dans un lieu saint, la majorité des visiteurs saluèrent en revanche le génie de l’artiste. La population de Bry fut extrêmement reconnaissante envers Daguerre d’avoir offert à la commune cette œuvre monumentale. La sympathie dont il était l’objet à Bry lui valut d’être élu conseiller municipal. Il prêta serment et fut installé au sein du conseil le 10 août 1843. Jusqu’à sa mort, Daguerre participa avec assiduité aux séances du conseil municipal.

Louis Daguerre mourut brutalement à Bry le 10 juillet 1851. En témoignage de reconnaissance, le conseil municipal de Bry offrit à Daguerre et à sa famille une concession perpétuelle dans le cimetière communal. L’année suivante, un monument funèbre fut élevé au-dessus de sa sépulture par la Société des Beaux-arts. L’inauguration du monument, célébrée le 4 novembre 1852, donna lieu à une émouvante cérémonie d’hommage qui rassembla l’ensemble de la population de Bry et de nombreuses personnalités du monde artistique, politique et scientifique.